Une manifestation pour défendre la Nation catalane et son statut récemment remis en cause par la justice espagnole, a pris les allures d'une démonstration de force aux forts accents indépendantistes. Une foule immense, estimée à 1,5 million de Catalans, a envahi les grandes avenues du centre-ville de Barcelone pour signifier son rejet de la décision du Tribunal constitutionnel espagnol qui gomme des aspects importants du nouveau statut d'autonomie, adopté en 2006. En effet, la haute juridiction a estimé dans le détail de son arrêt, que le terme de «nation» définissant la Catalogne dans le statut, n'avait pas de valeur juridique, car «la Constitution ne connaît qu'une nation, l'Espagne». Un point crucial aux yeux des partis nationalistes catalans. Pour les juges de Madrid, la Catalogne serait une nationalité pas une nation. La haute juridiction espagnole a également rejeté le caractère «préférentiel» de la langue catalane sur l'espagnol et écarté l'émergence d'une autorité de tutelle régionale pour la justice, réaffirmant l'unicité de l'autorité nationale, le Conseil général du pouvoir judiciaire. L’imposant cortège était précédé d'un immense drapeau catalan sous lequel se tenaient six présidents et anciens présidents du gouvernement catalan. Au cours de cette manifestation géante, plusieurs slogans avaient la vedette : « Nous sommes une Nation » et « C'est à nous de décider », tandis que des milliers de bannières catalanes rouges et jaunes flottaient dans une foule avançant au pas.
«Cette manifestation est le commencement de l'indépendance que nous voulons pour notre pays», la Catalogne, a commenté dans la foule Jordi Cau, un étudiant aux convictions indépendantistes affirmées.
«Cette décision du Tribunal constitutionnel a accru notre volonté d'indépendance», a estimé une autre participante, Julia Nadal, professeur dans la ville catalane de Sabadell.
La manifestation organisée par Omnium Cultural, association pour la promotion de la langue et l'identité catalane, proche des indépendantistes, avait reçu le soutien des principaux partis de Catalogne (la grande coalition nationaliste de centre-droit CiU, les indépendantistes de gauche d'ERC et même la branche catalane du Parti socialiste (PSOE) au pouvoir à Madrid avait appelé à se joindre à cette protestation, non sans arrière-pensées électorales avant le renouvellement du parlement catalan à l'automne). Seuls les conservateurs du Parti populaire (PP) étaient absents.
Les observateurs font remarquer que cette décision de l’Etat espagnol ne fera que booster les partis nationalistes lors du vote pour les législatives régionales en novembre prochain. Un référendum pour l'indépendance est aussi prévu bien qu'aucune date n'ait été spécifiée. Pour conclure, si, pour l'Espagne, il n'y a qu'une seule nation : la nation espagnole, mais avec des nationalités, pour la France, c'est plus simple, il n'y a même pas de nationalités. Autrement dit, le pouvoir central espagnol, comme d'ailleurs le pouvoir central français ou chinois, quoi que de façons différentes, redéfinissent les mots pour des raisons politiques. Ces États se réservent le droit de se définir comme nation et de nier ce droit aux autres nations qui pourraient se trouver sur leur territoire.
La Catalogne, loin de se rendre, se montre disposée à hausser la voix pacifiquement mais de manière ferme.