« Laitue de mer », « salade »… plus scientifiquement il en existe deux espèces. Elles se nomment Ulva armoricana et Ulva rotundata. L’ulve est une algue à la croissance exponentielle pour peu que soient réunies les conditions nécessaires à son épanouissement : ensoleillement (si le soleil déclenche la pousse il peut aussi par un rayonnement intense dégrader leurs pigments chlorophylliens et provoquer l’arrêt de leur croissance), profusion de nutriments. Quelle est la source de cette inquiétante prolifération des algues vertes ? Ce phénomène de prolifération massive est du à un enrichissement trop important en éléments nutritifs. Les « marées vertes » qui s’accumulent en de nombreuses baies des côtes bretonnes représentent un exemple très littoral de l’eutrophisation créée par des apports excessifs de nitrate issus des bassins versants.
Comment s’est-on rendu compte qu’il existe bien un lien entre la présence de nitrate et la prolifération des algues ? C’est le résultat d’une étude sérieuse, publiée en 1911 par Letts et Richards, à propos de proliférations d’ulves situées au débouché d’égouts en Angleterre et confirmé depuis par des scientifiques sérieux. L’ulve se nourrit principalement de phosphore et d’azote. Les fonds sableux de ces baies bretonnes de prédilection lui sont une continuelle source de phosphore par les rejets urbains principalement. Par contre, l’apport massif d’azote est majoritairement d’origine agricole avec comme responsable la super fertilisation des sols. Si les paysans bretons ont une grande responsabilité dans l’apparition des « marées vertes », sont-ils vraiment les seuls ?
N’y aurait-il pas des industries qui auraient, elles aussi, une part de responsabilité… sans oublier la simple ménagère, ou le retraitement totalement inefficace par les stations d’épuration actuelles de certains médicaments ? Toutefois, des études sérieuses, et non des délires de pseudos et irresponsables défenseurs de l’environnement baptisés « écologistes », ont largement démontré que c’est l’augmentation des nitrates dans les cours d’eau bretons qui a permis, dans les baies naturellement confinées, la prolifération excessive des ulves. On a constaté que lors des années sèches, les précipitations printanières qui induisent un lessivage des nitrates des sols et accroissent le débit des cours d’eau, le volume d’algues est moindre. Le ramassage de tonnes d’ulves échouées annuellement engendre des coûts en constante augmentation, coût pris en charge à 80% par les Conseil Généraux, le traitement ultérieur restant aux frais des communes concernées. Le dépôt reste souvent très anarchique.
Aucun contrôle sérieux ni suivi concernant les mises en décharge. Du fait de la dégradation rapide de la matière organique de ces algues, leur mise en dépôt revient à un transfert de pollution. Le « jus » d’algue chargé en azote minéral, très soluble, rejoint les zones sensibles en un court délai. Il est impératif de protéger les sites terrestres et les nappes phréatiques. L’épandage est actuellement la meilleure solution au devenir des ulves. Cet épandage n’occasionne aucun dégât pour les cultures, bien au contraire, il améliore les propriétés physiques du sol grâce notamment au sable, bon élément stabilisant. Il apparaît impératif de développer l’information auprès des paysans bretons afin que l’épandage réalisé dans de bonnes conditions et dans les règles, puisse constituer un débouché. Phénomène nouveau dans l’échelle des nuisances. Si elles étaient principalement d’ordre visuel et olfactif, il s’avère aujourd’hui qu’avec la putréfaction de tonnes d’ulves se dégage de l’hydrogène sulfureux, non seulement nauséabond, néfaste pour les espèces vivantes du milieu, mais aussi mortel à certaines doses. L’actualité récente, avec la mort de chiens, d’un cheval et d’un homme, confirmerait cette analyse. Certaines études démontrent en effet que les émissions d’hydrogène sulfuré sont proches des concentrations limites fixées par l’Organisation Mondiale de la Santé. Les experts de l'Ineris préconisent pour le moment d'interdire l'accès aux zones concernées et d'équiper de systèmes de détection le personnel chargé du ramassage des algues. Un chercheur du CNRS, Claude Lesné, conseille même aux personnes âgées et à tous ceux qui souffrent de pathologies respiratoires de ne pas s’approcher des algues vertes en décomposition.
Alors maintenant, comment combattre l’eutrophisation à la source ? C’est en effet à la source que doit être supprimée la pollution. Tout le monde s’accorde aujourd’hui à désigner les nitrates d’origine agricole comme les premiers responsables. C’est donc ce modèle d’agriculture intensive et chimique qu’il faut réformer. Il n’est pas dans notre intention de hurler avec les loups, Khmers verts et autres agitateurs qui s’acharnent à condamner les paysans bretons. Non, il faut seulement reconnaître les faits et revoir l’orientation agricole bretonne. C’est l’image même de la Bretagne qui est en jeu.
Jelvestr Le Cloarec.